La mort de Michel Debus, ancien PDG des brasseries Fischer et Adelshoffen, dimanche 2 octobre à Schiltigheim, a suscité émotion et témoignages.

Le maître brasseur Michel Debus, PDG de Fischer et Adelshoffen, en 1988. Photo archives DNA

L’homme à la lavallière et à la blanche crinière, toujours tiré à quatre épingles, ne passait pas inaperçu. Les Schilikois n’auront plus le plaisir de le croiser. À 95 ans, Michel Debus a tiré sa révérence dans sa demeure du Vieux-Schilick.

Michel Debus s’est éteint à l’âge de 95 ans

Sur les réseaux sociaux, la Ville de Schiltigheim salue un « visionnaire, amoureux inconditionnel de la bière et attaché à l’Alsace ».

Un « Schilikois attaché à sa ville » précise Andrée Buchmann, adjointe au patrimoine. L’élue rappelle qu’il a eu « l’idée généreuse de concevoir la façade côté rue Principale de sa belle demeure alsacienne en œuvre démonstrative : volets peints, torchis visible, enseigne des brasseurs… ».

Cette maison appartenait à son grand-père avait confié Michel Debus à Julie Ranslant qui a recueilli son parcours d’adolescent pendant la guerre ( 1940 : retour dans l’Alsace annexée , Un bout de chemin Éditions).

Un « brillant chef d’entreprise » 

Michel Debus ne manquait pas une occasion de participer à des manifestations locales. Ici, il est aux côtés de la maire Danielle Dambach, première en 2018, à la première fête de la gastronomie organisée à Schiltigheim.   Photo DNA /Michel FRISON

« Il laisse un grand vide, c’était le pilier de notre famille » confie sa petite-fille Jade Debus en évoquant celui que ses six petits-enfants appelaient « paps ». Un vide d’autant plus grand que son épouse Raymonde et ses quatre enfants, Ève, Valérie, Michel et Olivier, sont morts avant lui, emportés par la même maladie.

C’est grâce à son « paps » octogénaire que Jade Debus s’est lancée, à 21 ans, dans la grande aventure de la restauration, en 2016, avec la brasserie Michel Debus, un restaurant qui lui appartient désormais. Dans le même bâtiment, au cœur de l’écoquartier Adelshoffen, se trouve la brasserie artisanale Storig, qui produit la bière du même nom et dont Michel Debus était l’actionnaire principal.

Christian Geissmann, son mandataire financier, gérant de la brasserie Storig, a eu « la chance de côtoyer Michel Debus pendant 15 ans ». Il salue « un brillant chef d’entreprise » qui lui a confié la mission de « pérenniser la brasserie Storig ». « Je me battrai parce que c’est la dernière trace brassicole qu’il laisse ».

Michel Debus, né à Strasbourg en 1926, a repris le flambeau de son père Robert à la tête des brasseries schilikoises Fischer et Adelshoffen. Ardent défenseur de la bière alsacienne, président des Brasseurs d’Alsace, il avait dû se résoudre à vendre ses brasseries au groupe Heineken, en 1996.

C’était « un personnage aux multiples facettes : le brasseur, le peintre, le sculpteur, le poète » se souvient Patrick Gauger, qui a travaillé avec lui à la brasserie Fischer. L’ancien syndicaliste CGT est peu à peu devenu un proche du maître brasseur, au point qu’il lui a confié un temps la gérance de la brasserie Storig.

Patrick Gauger se souvient de l’amour de Michel Debus pour les innovations, bière à la tequila ou aphrodisiaque… « J’encourage toujours les idées des autres quand elles correspondent aux miennes » confiait-il aux DNA en 1987, avec l’humour dont il savait faire preuve.

Un travail de mémoire et un livre

Le conseiller municipal Dera Ratsiajetsinimaro (Rassemblés pour Schilick) propose que la Ville de Schiltigheim entame un travail de mémoire et se penche sur le parcours des « enfants de la brasserie » qui ont façonné Schilick.

Cela tombe à pic : Patrick Gauger prépare un livre avec Élisabeth Pierre, zythologue et auteure, sur Michel Debus et la bière en Alsace. Élisabeth Pierre a découvert l’univers brassicole grâce à Michel Debus, alors qu’elle faisait la communication des Brasseurs de France.

Elle ne manque pas de rappeler l’un des exploits du maître brasseur : avoir réussi à faire plier les brasseurs allemands, après un long combat judiciaire contre la « Reinheitsgebot » ou « loi de pureté de la bière » qui interdisait aux bières étrangères toute vente outre-Rhin.

Les obsèques de Michel Debus auront lieu vendredi 7 octobre à 14 h à Schiltigheim, en l’église Sainte Famille.